Guides de haute montagne

Voyage d'escalade à Madagascar

Mercredi 9 Octobre 2019

Voilà quelque chose de dépaysant. Loin des standards.
L’idée a germé il y a un an au retour de Jordanie avec Jérôme et Thomas, la team médicale.
Où va-t-on ? Que fait-on ?
Nous avions tous les trois plusieurs destinations en tête mais Madagascar l’a emporté haut la main.
Pourquoi ? Les parois mythiques du Tsaranoro nous faisaient tous rêver et nous voulions réaliser nos rêves.
J’aime particulièrement cette équipe pour ça. Ils sont motivés tout comme moi!!!
Alors, chacun s’est entraîné. Nous avons même grimpé ensemble en falaise avec Tom pour trouver de bonnes sensations. Elles étaient bien présentes et heureusement d’ailleurs

Après un long vol jusqu’à Antananarivo, je n’ai pour part qu’une inquiétude : que les bagages ne nous aient pas suivi...mais ce n’est pas le cas.
Les sacs North Face colorés sont bien présents et nos chauffeurs aussi.
 
Après avoir changé quelques euros en Ariary qui nous rendent millionnaires dans la monnaie locale, nous attaquons la route.
Le trajet en véhicule dure 15 heures le long de la Nationale 7 (RN 7).
C’est dépaysant et nous en prenons plein les yeux. Un voyage dans le séjour.
La traversée de villages, les rizières qui longent cette route, les fabriques de briques, le sourire des gens, les véhicules accidentés, les cascades, ....autant de menues choses qui se gravent dans nos mémoires.

Après une courte halte à Fianarantsoa nous poursuivons tôt en matinée notre périple.
Un changement de plaquettes de freins plus tard, nous quittons la route pour prendre la piste d’accès à la nature encore plus profonde.
La piste, ouverte il y a une vingtaine d’années, réduit considérablement le trajet et surtout l’isolement des villages.
Notre véhicule se transforme en taxi brousse et les travailleurs des champs profitent de l’engin motorisé pour réduire la fatigue journalière.
 
Au bout d’une heure de conduite nous découvrons les falaises sur la droite. Pas de doutes.
Nous avons déjà tellement usé les topos que nous connaissons les faces par cœur.

L’arrivée au Lodge de Tsarano est très agréable. La vue est splendide et les gens très gentils.
Comme le trajet a été plus long que prévu et que la météo ne semble pas au beau fixe, nous en profitons pour faire un tour du massif l’après-midi et repérer les descentes des sommets principaux.
Rien que la randonnée est une pure merveille avec des abrupts somptueux dans une végétation luxuriante.

À partir du lendemain, nous attaquons l’escalade à proprement parler dans une démarche montagnarde qui aura très bien fonctionné dans l’ensemble.
Je m’explique. Réveil avec le lever du jour avec un petit déjeuner sportif préparé par Fali et départ très tôt. Ainsi, la marche d’approche se fait « à la fraîche »…et le risque d’orages l’après-midi est plus limité.
Par contre on grimpe au soleil. On ne peut pas tout avoir… mais cela est acceptable avec les alizés qui soufflent dès les premiers relais.
 
La cordée est rôdée depuis bien longtemps et les sensations reviennent vite. Entre vitesse dans les manipulations de cordes aux relais et grimpe efficiente dans les longueurs les voies s’enchainent tous les jours.

Mais les rituels sont immuables. Avant de décider de la voie du lendemain nous apprécions celle réalisée le jour même. Personne n’a envie de parler du jour d’après car nous savons qu’il nous rapproche inexorablement de la fin…comme la vie sûrement.
À l’instant de la bière nous en parlons. L’objectif est de se préparer pour aller réaliser « Out of Africa ».
 
Après avoir pris nos marques pendant 3 jours, nous nous octroyions une journée plus cool en partant plus tard pour grimper à l’ombre.
Heureusement que la voie est courte et la cordée rapide car à l’arrivée dans la vallée, le ciel nous tombe sur la tête. Trois heures sans discontinuer.
Comme une alerte ou un avertissement.

Nous en prenons compte et décidons de renoncer au projet pour le lendemain puis les jours d’après dans un second temps car l’incertitude météo est trop importante dans un pays où l’engagement est déjà suffisamment important dans les voies d’escalade.
 
Mais nous réalisons de belles voies dont une avec notre guide, cuisinier et serveur. Fali qui grimpe super bien déroule dans les longueurs de 6b+
Quelle énergie à rigoler et appeler les jeunes du village pour signifier sa joie !!! « C’est bon ça !!! » Un Leitmotiv qui résonne encore dans nos oreilles.
Mais toutes les bonnes choses ont une fin et le retour s’annonce déjà. 15 heures de route mais que nous apprécions au rythme des siestes, lectures, observations des paysages et pause culinaire…

L’harmonie est bien présente dans cette cordée où les regards suffisent à se comprendre.
 
Ce ne sera sûrement pas notre dernier périple. Nous allons continuer à aller explorer des pays, rencontrer des gens et gravir des montagnes puisqu’elles sont là.


Cédric Specia, Guide de haute montagne

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